Le décret tertiaire
Le Décret Tertiaire (DT) n° 2019-771 du 23 juillet 2019, entré en vigueur le 01/10/2019, vient préciser la loi ELAN du 24 novembre 2018 sur la question des « obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire ». Il s’appuie sur un arrêté « méthode », du 10 avril 2020.
Cet arrêté vient préciser les conditions de mise en œuvre des réductions des consommations énergétiques, le fonctionnement de la plateforme de recueil et de suivi, et les modalités de modulation des objectifs ainsi que leur justification via le dossier technique.
Les principes du décret et de l’arrêté
Le décret est un premier pas vers l’obligation de rénovation des bâtiment tertiaires. Les « assujettis » à ce décret sont les propriétaires de bâtiments à usage majoritairement tertiaire de plus de 1000 m² ainsi que les preneurs à bail de ces bâtiments. Le seuil de surface est défini par rapport à la surface de plancher, d’un seul tenant ou en surface cumulée.
Tous les bâtiments tertiaires sont concernés sauf :
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Des constructions ayant donné lieu à un permis de construire à titre précaire mentionné à l’article R.*433-1 du code de l’urbanisme,
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Des bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments destinés au culte,
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Des bâtiments, parties de bâtiments ou ensembles de bâtiments dans lesquels est exercée une activité opérationnelle à des fins de défense, de sécurité civile ou de sûreté intérieure du territoire.
Deux arrêtés modificatifs sont attendus pour clore cette première phase de mise en place du décret :
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Le premier, prévu pour septembre 2020, fixera les niveaux de consommations exprimés en valeur absolue par catégorie d’activité,
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Le second, en fin d’année, apportera des précisions concernant les bâtiments situés hors France métropolitaine.
Les modalités de calcul des objectifs
Afin de fixer les objectifs, la première étape consiste à définir une consommation de référence appelée Cref pour chacun des bâtiments concernés. Cette consommation est mesurée à travers les factures de 12 mois consécutifs et pour une date postérieure à 2010. Elle doit tenir compte des conditions climatiques de l’année de référence considérée : la plateforme procède donc à un ajustement climatique pour avoir une consommation de référence normalisée.
Cette consommation de référence, ainsi que les différents objectifs de consommations, sont en énergie finale (EF) avec une comptabilité en Pouvoir Calorifique Inférieur (PCI) pour les combustibles. Ces valeurs sont à ramener à la surface de plancher du bâtiment (SdP). En résumé, les consommations sont exprimées en kWhEF/m²SdP.an
Les objectifs du décret tertiaire sont calculés de deux manières, directement au sein de la plateforme OPERAT :
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Une réduction de consommation en pourcentage : l’objectif Crelat. Il se calcule en appliquant respectivement -40%, -50% et -60% à la consommation Cref pour 2030, 2040 et 2050.
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Un niveau de consommation à atteindre, exprimé en valeur absolue par catégorie d’activité : l’objectif Cabs, comprenant une composante pour le confort thermique et la ventilation (notée CVC) et une composante pour les usages spécifiques propres à l'activité et les autres usages immobiliers tels que l’eau chaude sanitaire (ECS) et l’éclairage (notée USE). La part CVC est fixe pour la catégorie d’activité. En revanche, la part USE est définie pour une intensité d’usage de référence, et elle peut être modulée en fonction de l’intensité d’usage des locaux.
Les deux seuils sont à calculer, et le seuil le plus facile à atteindre est retenu comme objectif.
Ces objectifs peuvent être atteints moyennant la mise en œuvre de différents types d’actions, qui portent sur 4 axes : les enveloppes des bâtiments, les équipements, leur exploitation et le comportement des occupants.
Pas de dérogation, mais un dispositif de modulation de l’objectif
Le décret tertiaire prévoit des possibilités de modulations de l'objectif fixé par bâtiment.
Premièrement, pour tenir compte d’une occupation et d’une utilisation qui peuvent différer d’usages moyens, les objectifs en valeur absolue peuvent être modulés sur la base d’indicateurs d’intensité d’usage de référence, spécifiques pour chaque catégorie d’activité. Cette modulation est mise en œuvre dans OPERAT directement avec la saisie de ces indicateurs.
Deuxièmement, celles-ci peuvent être demandées lorsque le bâtiment présente des critères objectifs expliquant pourquoi les objectifs ne peuvent être atteints. Différentes justifications peuvent être apportées par le maître d’ouvrage via un dossier technique traitant des sujets suivants :
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risques pathologiques liés aux travaux,
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bâtiments relevant des catégories monuments historiques ou sites patrimoniaux remarquables,
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difficultés rencontrées au regard du code de l’urbanisme, des limites séparatives ou de servitudes,
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et enfin coûts disproportionnés - appréciés par leur temps de retour brut - des travaux nécessaires par rapport aux avantages attendus.
Le dossier technique explicitant ces raisons doit être mis à disposition de l’administration. Pour soutenir la demande de modulation, un programme d’actions permettant d’atteindre l’objectif est à proposer, en regard des contraintes techniques et/ou des surcoûts constatés. Ce programme d’action doit s’appuyer sur un ensemble des leviers d’actions :
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la performance énergétique du bâti,
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l’installation d’équipements performants et bien régulés,
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les actions visant à réduire les consommations des équipements liés aux usages spécifiques,
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les modalités d’exploitation des équipements, l’adaptation des locaux à un usage économe en énergie et le comportement des occupants.
Plusieurs études sont à joindre pour justifier les choix d’actions dans le programme sur ces différents leviers.
Plusieurs chemins pour justifier de l’atteinte de l’objectif
En 2031, la première vérification de la conformité à la loi des assujettis aura lieu grâce aux données collectées dans OPERAT.
Le premier chemin de justification, le plus évident, est alors que la consommation annuelle de chaque bâtiment soit inférieure à l’objectif de consommation qui lui a été attribué.
Le décret et son arrêté prévoient un autre moyen de justification : la possibilité de justifier l’atteinte de l’objectif à l’échelle du parc, ou de plusieurs parties du patrimoine.
En théorie, cela signifie que, sur les périmètres choisis par le maître d’ouvrage, la somme des consommations de 2030 sera comparée à la somme des objectifs de chaque bâtiment de manière à mutualiser les résultats, les locaux les plus performants permettant de compenser les moins performants.
En pratique, cela sera géré par l’utilisateur en réaffectant l’écart de consommation par rapport à l’objectif d’une entité fonctionnelle assujettie à une autre entité assujettie n’ayant pas atteint l’objectif. Par exemple, un bâtiment ayant réalisé -50% dès 2030 par rapport à un objectif de -40%, pourra verser l’écart de 10% de consommation à un ou plusieurs bâtiments pour compenser l’(les) écart(s) sur objectif(s) constaté(s).
Ce système permettra à l’assujetti, en fonction de ses choix de réaffectation, d’orienter ainsi les sanctions administratives éventuelles sur certains locaux plutôt que d’autres.